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Masha et Milo, Nances (73)


Ce secours commence à 20h30, le samedi 18 janvier. Nous plannifions avec Pacôme au téléphone notre sortie en montagne du lendemain lorsque l’alerte est donnée. Nous apprenons que deux chiens sont coincés en Savoie et, qu'avec les sports d’hiver, les pompiers n’ont pas les effectifs nécessaires pour se lancer dans la recherche et le secours.

Immédiatement, nous sondons qui est disponible pour intervenir le lendemain. Il est tard, et seuls Pâcome, Rémy, Patoune et moi sommes disponibles.


Quelques appels avec la requérante et les pompiers nous permettent de préciser l’alerte. La situation s'annonce complexe : Masha et Milo, respectivement 13 et 35 kilos, ont fugué de leur foyer depuis trois jours. Les nuits sont très froides et, bien qu’ils n’aient pas été vus, des aboiements et des pleurs persistants provenant d’une falaise surplombant le village laissent penser qu’ils y sont coincés. Les informations recueillies indiquent qu’ils seraient localisés sur une avancée de la falaise, d’environ 150 mètres de largeur et 50 mètres de profondeur. Cette zone de recherche, déjà importante, n’est accessible qu’après une longue descente de presque 200 mètres de dénivelé dans une forêt très raide.


En rouge, la zone de recherche et son accès par le haut.
En rouge, la zone de recherche et son accès par le haut.

L’exploration prendra du temps, nécessitera beaucoup de matériel, et si les chiens sont retrouvés, leur remontée s’annonce encore plus exigeante. Afin d’augmenter nos chances de succès, nous décidons de prendre avec nous Fumeseck, notre drone à caméra thermique. Arnaud et Lucie, qui nous rejoindront en fin de matinée, piloteront le drone. Nous convenons d’un rendez-vous avec les requérants le lendemain matin, puis allons nous coucher.


Dimanche matin : début des recherches


Le réveil sonne à 6h30. C’est matinal pour un dimanche, mais raisonnable. Nous savons que la brume empêchera d’observer la zone de recherche aux jumelles, donc inutile de se précipiter. Nous apprenons cependant que Patoune est malade : nous devrons nous débrouiller à trois. Cela devrait suffire.

À 7h45, nous chargeons le pick-up avec cordes, harnais, et tout le matériel nécessaire pour le drone. Nous partons du Versoud à 8h30 et arrivons chez les requérants vers 9h30. Une première reconnaissance de la zone est effectuée depuis la vallée, avec des jumelles et le petit drone de poche de Pâcome. Comme prévu, la brume qui monte du lac d’Aiguebelette, accompagnée du soleil levant, complique énormément l’observation.





Pour optimiser les recherches, nous anticipons l’arrivée d’Arnaud et Lucie afin d’être le plus près possible de la zone quand Fumeseck sera opérationnel. Pâcome reste dans la vallée pour nous guider, tandis que Rémy et moi entamons une exploration avec un minimum de matériel afin d'être le plus efficace possible.



Début de la descente, les sacs à dos pleins de cordes.

Une exploration difficile


Nous commençons à descendre dans la forêt raide, équipé de cordes. Le terrain est instable, jonché de pierres prêtes à dévaler la pente. Lucie et Arnaud arrivent enfin quand la brume se lève : leur aide est précieuse. Tandis qu’Arnaud prend les commandes du drone, Lucie, psychologue de l’association, propose aux requérants, bouleversés par la fugue de Masha et Milo, de les rejoindre au véhicule.




Après une descente vers les coordonnées supposées des chiens, nous explorons la zone de recherche mais sans succès : il n’y a aucune raison que les chiens soient coincés ici. Le terrain est relativement simple, et des faiblesses de chaque côté de la falaise leur permettraient de redescendre facilement. Le drone confirme nos doutes : il n’y a que des chamois, des renards et des rochers en vue. Le moral en prend un coup. Nous amorçons une remontée, tout en élargissant les recherches grâce à Fumeseck.


Masha et Milo reste introuvables. On se contente alors de la vue extraordinaire.
Masha et Milo reste introuvables. On se contente alors de la vue extraordinaire.

Soudain, Arnaud repère nos deux fugitifs sur une petite vire, au milieu d’une barre rocheuse. Masha et Milo sont en vie ! Les requérants sortent les mouchoirs. C'est un relâché d'une énorme dose de stress qui coule sur leurs joues. L’annonce par radio redonne de l’énergie à toute l’équipe et nous motive à mettre le turbo pour remonter ces 200 mètres de dénivelé de forêt très raide.





Secours en falaise


Sur la droite, Masha et Milo sont localisés sur une vire au milieu d'une falaise.
Sur la droite, Masha et Milo sont localisés sur une vire au milieu d'une falaise.

Masha et Milo se trouvent précisément 400 mètres à droite de notre position, légèrement plus plus proche de la route. Pâcome nous rejoint, nous rangeons rapidement le matériel dans le pick-up et nous rapprochons de la zone. Cette fois, nous sommes trois, ce qui nous permet d'emporter tout le nécessaire pour la sécurisation de l'approche ainsi que le hissage d'un chien avec un secouriste en sécurité.


Malgré le beau temps, Fumeseck est cloué au sol. En effet, de nombreux parapentistes survolent la zone et nous ne pouvons pas signaler sa présence. C'est donc aux jumelles qu'Arnaud nous repère et nous guide au dessus de la falaise. Ces indications précises nous permettent d'atteindre rapidement l'aplomb des chiens.


Arrivez-vous à distinguer Pacôme et Rémy ?
Arrivez-vous à distinguer Pacôme et Rémy ?

Une fois l'ancrage établi, je descends en premier pour sécuriser les chiens, suivi de Rémy qui se prépare à remonter en premier avec Masha, tandis que je remonterai avec Milo pour finir. La gestion des frottements n’est pas évidente dans ce terrain, et les chutes de pierres sont fréquentes. Cela nous oblige à être extrêmement attentifs pour trouver l'axe de descente le plus sécurisé possible.




Je descends en rappel une vingtaine de mètres et rejoins rapidement les chiens. Alors que je termine une traversée en équilibre pour les atteindre, Masha ne me laisse même pas le temps de me présenter : elle commence déjà à me léchouiller. Après quelques caresses bien méritées, je les sécurise dans leurs baudriers. Masha, avec ses 15 kilos, est facile à manipuler, mais Milo, avec ses presque 40 kilos, demande plus de temps et d'efforts. Je transmets alors Masha à Rémy qui l'installe sur la corde de hissage pendant que Pâcome prépare le mouflage. Après une vingtaine de minutes d’efforts intenses, Rémy et Masha sont hissés hors de la falaise.


Rémy et Masha actuellement dans l'ascenseur le plus lent mais aussi avec la plus belle vue des Alpes. On peut pas tout avoir :) Force à Pacôme qui hisse tout seul là-haut.

Puis, c’est notre tour avec Milo. Suspendu dans le baudrier, je profite un instant de l’extraordinaire coucher de soleil sur le lac d’Aiguebelette. Rapidement, nous nous retrouvons au sommet, aux côtés de Pâcome, Rémy et Masha.


À notre tour de se faire hisser avec Milo.

Les retrouvailles


Le plus dur est fait. Il nous reste à ranger le matériel et à rejoindre la route, où le reste de l’équipe, ainsi que la famille de Masha et Milo, nous attendent. Malgré leur fatigue, Masha et Milo se transforment en véritables chiens de traîneau dès qu'ils les virent, nous tirant avec excitation jusqu'au sommet de la pente.


Masha et Milo de nouveau réunis, il ne reste plus qu'à rejoindre la route.
Masha et Milo de nouveau réunis, il ne reste plus qu'à rejoindre la route.

Les retrouvailles sont fortes en émotions lorsque Masha et Milo se jettent dans les bras de leur famille. Sous la faible lumière de nos frontales, les sourires illuminent les visages. C’est une belle récompense après cette journée longue et éprouvante.



De retour chez les requérants, nous partageons un repas chaleureux en assistant aux retrouvailles de Masha et Milo avec le reste de la famille. On espère tous que cette aventure leur servira de leçon et calmera les envies d'exploration de Masha.


Nous quittons les lieux en fin de soirée, direction le Versoud, pour ranger et vérifier le matériel. Fatigués mais heureux, nous rentrons sur Grenoble à 22h30, satisfaits d’avoir sauvé Masha et Milo, et d’avoir partagé ces moments de solidarité avec une équipe formidable.


Ce récit vous est raconté par Maxime

1 Comment


HHH
Jan 29

Très émouvant. Bravo !

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